Stéphanie Heurtaut : Consultante en amélioration de la performance interne des TPE-PME
Bonjour Olec, merci de m’avoir proposé de recueillir le témoignage d’un de mes clients, cela nous donne l’occasion d’échanger sur les bonnes pratiques de mise en place d’un SMQ dans une PME, si chères à notre groupement PQTP.
Félicitations à toi Stéphanie pour ce témoignage de réussite ! Peux-tu nous dire ce qui a déclenché la mission ?
Quand Thibaut Robin m’a consultée en septembre 2019, il espérait conserver le certificat obtenu par Eurovoirie Bucher Municipal, pour la partie Ventes et Service après-vente d’équipement de collecte de déchet. Après concertation avec l’organisme certificateur, il s’est avéré que ce n’était pas possible puisqu’une nouvelle entité était créée. Je lui ai présenté la construction de son propre système comme une réelle opportunité. Nous avons fait du sur-mesure plutôt que du copier-coller.
Comment s’est déroulé l’accompagnement ?
J’ai travaillé en direct avec les quatre membres du CODIR, lors de séances de travail thématiques, en présentiel ou à distance. Entre les séances, il leur revenait de déployer les messages et les pratiques auprès de leurs équipes. Ils m’ont tous bluffée par leur appropriation et le leadership dont ils ont fait preuve sur tous les sujets.
Très bien ! Et plus précisément, comment avez-vous procédé ?
Nous sommes repartis d’une page blanche, nous avons fait table rase du système de gestion documentaire pour ne garder que l’essentiel.
Nous avons réfléchi ensemble à la simplification de la cartographie des processus, avec simplement deux processus de bout en bout et des activités supports.

Puis j’ai accompagné chacun des pilotes, le directeur commercial et le directeur SAV, pour leur permettre de modéliser les flux d’activités et réaliser les analyses des risques de leur processus.
Quel a été l’intérêt constaté de cette approche ?
Commencer par du concret en modélisant les flux d’activités, permet aux équipes de visualiser toutes les activités clés de leur entreprise sur un même schéma. Les tableaux sont évolutifs et en interactions, on peut revenir sur le flux d’activité en réalisant la fiche processus ou l’analyse des risques. Les flux d’activités visuels servent à la communication avec l’ensemble des collaborateurs, notamment lors de la revue de processus et la revue de direction. Et enfin, cela permet de ne rien oublier.
La force des outils simples que l’on utilise dans le groupement PQTP, c’est qu’ils laissent la possibilité à ceux qui les reçoivent d’apporter leur amélioration et leur grain de sel.
Et par la suite, quels sujets avez-vous abordés collectivement ?
Nous avons travaillé sur les activités supports et identifiés les risques et opportunités liés à ces activités ; avons abordé tous les sujets relatifs aux parties intéressées pertinentes : compétences des collaborateurs, évaluations des fournisseurs stratégiques, enquêtes de satisfaction clients, etc. Et nous avons mis en place des indicateurs pour surveiller la performance de toutes ces activités.
La revue de direction, quelques mois après la mise en place du système, a permis de revoir tous ces points et d’identifier les actions d’amélioration à venir, celles-ci ont été répertoriées dans le PAQ (Plan d’Amélioration de la Qualité).
Enfin, un autre consultant, Jean-Yves Turmel, lui aussi membre de PQTP, est venu réaliser un audit interne, pour apporter son œil externe et avisé sur le SMQ.
Cela paraît très complet en effet. Et au global, peux-tu nous dire combien de temps a-t-il été nécessaire pour obtenir la certification ?
Nous avons pu commencer en septembre 2020, peu de temps après l’arrivée de Christèle, en charge du maintien de la démarche Qualité. Et en juin 2021, Terberg Matec Sas a obtenu le certificat ISO9001 : 2015 : beau résultat obtenu par l’équipe de direction et l’ensemble de l’équipe grâce à leur appropriation de la démarche et des outils !.
Pour conclure Stéphanie, quel enseignement tires-tu de cette expérience ?
Principalement, que chaque mission est une nouvelle gageure pour mettre en place une démarche qualité robuste et pérenne, adaptée aux spécificités de l’entreprise. Avec l’équipe de Terberg Matec Sas, ce challenge a été relevé avec brio !! Me voilà encore plus forte et expérimentée, de nouveau prête à accompagner d’autres TPE-PME, quel que soit le secteur d’activité dans lesquelles elles interviennent.
Propos recueillis par Olec Kovalevsky
Benoit Boton : Directeur commercial
Témoignage recueilli par Stéphanie Heurtaut
Bonjour Benoit et Frédéric. Nous avons travaillé ensemble pour conceptualiser les processus Ventes et SAV. En quoi l’approche d’analyse des flux de bout en bout vous est-elle parue pertinente ?
Formaliser les flux de nos activités dans leur globalité s’est révélé essentiel pour simplifier nos process, surtout dans une activité commerciale ou l’administration des ventes joue un rôle essentiel. Les interactions avec les autres services sont claires et peuvent être facilement comprises par l’ensemble des collaborateurs ou visiteurs. Enfin cette approche était indispensable pour structurer notre jeune société avec de nombre collaborateurs récemment arrivés.
Avez-vous rencontré des difficultés pour réaliser l’exercice ? Si oui, comment les avez-vous surmontées ?
L’exercice n’a pas été difficile en soit car notre équipe était déjà très sensibilisée au SMQ. D’ailleurs nous avions déjà mis en place des process qui se sont intégrés facilement à notre système qualité après quelques adaptations.
La difficulté s’est plus portée sur la nécessité de stopper nos activités quotidiennes et prendre le temps de la réflexion. La présence d’un conseil a été de fait indispensable pour planifier et animer ces séances et rendez-vous.
En une phrase, quel gain la mise en place de la démarche qualité vous a-t-elle apporté ?
La démarche qualité nous apporte un cadre pour effectuer toute notre activité professionnelle afin de nous améliorer continuellement.
Christèle Hamon : Directrice administrative et financière
Bonjour Christèle. Vous avez coordonné les différentes étapes de mise en place de la démarche, y a-t-il une étape qui vous a particulièrement mobilisée ? laquelle et pourquoi ?
Le Système de Management de la Qualité a été mis en place alors que la société n’avait que quelques mois d’existence. Deux des quatre directeurs, dont moi-même, venions d’arriver au sein de la société et commençaient tout juste à prendre leurs marques. Tous ces questionnements et ces réunions ont permis de structurer nos méthodes de travail à tous les niveaux : les analyses des risques et des non-conformités, les flux d’activités des processus, l’évaluation des fournisseurs, la gestion documentaire…
L’étape de mise en place du SMQ qui m’a particulièrement mobilisée et que j’ai trouvé particulièrement enrichissante au niveau RH est sans doute la mise en place de la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences. Le plan de développement des compétences a permis d’identifier très précisément les formations à réaliser pour tout le personnel et de prévoir les évolutions de postes et les mouvements du personnel. Nous avons également identifié les risques liés aux compétences détenues par une seule personne. A ce jour, toutes les formations prévues ont été effectuées ou sont planifiées dans les mois à venir. Vu le nombre de nouveaux collaborateurs que nous avons embauchés, ce plan est revu très régulièrement et nous permet d’être toujours dans un plan d’amélioration continue.
Et maintenant que vous avez obtenu la certification ISO9001, comment faites-vous pour maintenir un SMQ robuste ?
Tous les outils mis en place pour le Système de Management de la Qualité sont utilisés régulièrement et accompagnent le bon développement de la société.
Les actions identifiées lors de l’analyse des enjeux, des parties intéressées pertinentes, des risques & opportunités liées aux processus, des audits internes, ou encore de la revue de direction sont répertoriées dans le PAQ (Plan d’Amélioration Qualité) et sont revues mensuellement lors des Comité de Direction. L’efficacité de ces actions est évaluée trimestriellement, toujours dans un souci d’amélioration.
Les indicateurs mis en place sont également revus mensuellement. Cela nous a permis également d’améliorer nos indicateurs et de les faire évoluer.
Le tableau des non-conformités est revu chaque semaine par les directeurs des départements SAV et Vente et un point est fait trimestriellement en CODIR.
La Politique Qualité de Terberg Matec est affichée très clairement pour nos salariés et les réunions mensuelles avec le CSE nous permet de leur rappeler. Les questions de sécurité, de communication, de formation sont abordées à chaque réunion.
Et enfin, nous sommes efficacement accompagnés et challengés par un conseil externe lors de nos revues de processus, d’audit interne et revue de direction.
Et après … Parlez-nous de la prochaine étape qui semble vous tenir très à cœur …
Lors de l’audit de l’ISO9001, notre auditeur nous a parlé de l’ISO26000 et de la Responsabilité Sociétale des Entreprises. Cela a tout de suite fait tilt ! il nous a semblé évident que la prochaine étape serait celle-là, surtout étant donné notre activité.
Nous sommes tous sensibles aux enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques. Le développement durable a vraiment un sens pour nous et le challenge va être de sensibiliser TOUS les salariés dans cette nouvelle étape.
Premiers pas en qualité de Terberg Matec Sas, équipementier de collecte de déchets.
Bonjour Thibaut, ravie de vous retrouver après l’été et la période de pandémie qui nous a tous bousculés… Merci à vous et votre équipe d’avoir accepté de témoigner de la mise en place de votre Système de Management de la Qualité. Pouvez-vous nous présenter Terberg Matec sas ?
Terberg Matec sas est la filiale francaise du group Terberg Ros Roca, leader mondial dans le secteur des équipements de collecte de déchets. Nous sommes implantés depuis plus de 40 ans sur le marché français. Cependant, suite à une restructuration et cession de quelques activités, nous avons constitué une nouvelle entité juridique début 2020. Nous avons renforcé notre équipe de nombreuses nouvelles recrues, sur des postes de direction, de techniciens et d’administratifs.
Ceci a été l’opportunité de bâtir une organisation repensée, en renforçant la culture d’entreprise voulue par le groupe familial Terberg, faite de process solides, d’une culture de l’intrapreneuriat et d’un souci permanent pour le bien-être de nos salariés.
Pourquoi avez-vous souhaité mettre en place une démarche qualité chez TM SAS ? dans quel contexte ?
Dans le contexte que je viens d’évoquer, il nous a semblé absolument nécessaire de partir sur des référentiels communs à tous en lançant une démarche qualité couvrant tous les process de l’entreprise. Après la communication de notre politique qualité, la formalisation des process, la mise en place d’une gestion documentaire rigoureuse, il était nécessaire de nous assurer que nos décisions s’intègrent dans un plan d’amélioration continue, permettant d’en tracer les avancées. Le comité de direction a mis en place un véritable système d’amélioration continue au travers d’outils que nous faisons vivre au quotidien, dont le PAQ (plan d’amélioration de la qualité), le suivi des non conformités, et les revues de processus.
En quoi votre perception de la mise en place d’un SMQ a-t-elle évoluée entre notre premier contact et aujourd’hui ?
Dans une entreprise récemment constituée, avec plus de 50% des effectifs qui ont moins d’un an d’ancienneté et en pleine croissance, les journées sont courtes, et les urgences quotidiennes innombrables. Les tâches nécessaires à la mise en place d’un système qualité auraient été repoussées sine die, si nous n’avions pas eu l’accompagnement d’une consultante comme vous, pour ordonnancer les tâches, animer les réunions de travail et fixer des échéances. En moins d’un an, nous avons relevé le défi de nous faire certifier ISO 9001.
Quels en ont été les bénéfices pour l’entreprise ?
La démarche nous a permis sans aucun doute de gagner en rigueur et en performance.
Très bien. Vous connaissant, je suis sûre que vous n’allez pas vous arrêter en si bon chemin ? …
Nous nous engageons maintenant dans une démarche RSE de labellisation ISO 26000 complémentaire de notre démarche qualité, et dont nous attendons une grande adhésion de l’ensemble de nos collaborateurs.
Premiers pas en Qualité dans les TPE – PME
En cette fin d’année 2021, la situation globale du pays est telle que toutes les conjectures sont possibles : les optimistes peuvent voir des signes encourageants dans la reprise économique, la maîtrise de la situation sanitaire, la vitalité du marché du travail, l’intérêt grandissant pour l’écologie … et les pessimistes peuvent nourrir leurs sombres prévisions et affirmer, même sans certitude, que nos actions et progrès ne seront pas suffisants face aux menaces, risques et défis auxquels nous sommes ou serons confrontés. C’est déjà une chance que notre situation globale autorise cette double lecture !
Toutes choses égales par ailleurs, les chiffres fournis par l’ISO dans son enquête annuelle sur la certification de systèmes de management dans le monde (ISO 9001, ISO 14001, ISO 27001, ISO 22000, ISO 45001 …), établis fin 2020 et publiés en septembre 2021, légitiment une double lecture également. La croissance en nombre de certificats et de sites concernés suit le nombre croissant de référentiels et leur développement, même faible, dans les pays, plus nombreux à les adopter aussi. Pour l’année 2020, largement impactée par les conséquences du Covid-19, ces résultats montrent pour le moins une bonne résistance des démarches qualité, sécurité, environnement. Les plus optimistes pourraient même y voir une certaine causalité entre certification de systèmes de management et la résistance des entreprises face aux crises et aux aléas !
D’autres, plus sceptiques et critiques, peuvent légitimement faire remarquer que la Chine porte à elle seule l’essentiel du résultat positif de croissance pour l’ISO 9001 et l’ISO 14001, représentant près de 80 % des certifications mesurées.
Cela insiterait donc à avoir une lecture fine, par régions du monde voire par pays. En ce qui concerne la France, comme annoncé dans le chapeau introductif, les chiffres sont plutôt encourageants : légère croissance en nombre de certificats (ISO 9001 : + 0,8 % et ISO 14001 : + 0,9 %) et augmentation davantage marquée au niveau du nombre de sites concernés.
Est-ce un résultat de plus, accréditant l’idée que la France a plutôt bien traversé cette période mouvementée ? Faut-il y voir un signe d’espoir ? Chacun est libre de l’interprétation qu’il entend faire de ces données globales, traditionnellement critiquées car basées sur des déclarations faites à l’ISO par les organismes de certifications.
Pour ce qui nous concerne, au sein du groupement Performance Qualité TPE-PME, notre engagement auprès des TPE – PME pour leurs démarches qualité, QSE et RSE reste intact ! Nous vous proposons, dans ce numéro, le témoignage de l’entreprise Terberg Matec SAS, équipementier dans le secteur de la collecte des déchets, accompagnée dans sa démarche de certification ISO 9001 par Stéphanie Heurtaut, membre de notre groupement et gérante d’Optim’Conseil, spécialisée en amélioration de la performance interne des TPE – PME.
Christèle Hamon : Directrice administrative et financière
Benoit Boton : Directeur commercial
Olec Kovalevsky
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Le déplacement de charges lourdes ou répétitif de chariots peut engendrer des Troubles Musculo-squelettiques (TMS) puisque cela oblige les utilisateurs à fournir davantage d’efforts.
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Premiers pas en Qualité dans les TPE – PME
J’ai fait la connaissance de David en 2015 sur LinkedIn dans le groupe de discussion “Revision ISO 9001 : 2015”, administré avec talent par un homme de l’art, Sidney Vianna, engagé auprès de DNV – GL depuis plus de 30 ans. Ce groupe de discussion a été récemment rebaptisé “ISO 9001:2015 confirmed as is – May 2021” faisant référence à la récente décision de l’ISO de ne pas procéder en 2022-23 à la 6ème révision attendue, selon le rythme de révision auquel l’ISO nous avait habitué.
David est un spécialiste et un exégète de l’ISO 9001 et, dans la plus pure tradition britannique, il n’a pas son pareil pour décortiquer le contenu du couple ISO 9000/9001, ses origines, ses fondements théoriques et son exploitation pratique, au travers d’explications nourries par une longue carrière dans les industries de la Tech, comme on dit aujourd’hui !
Il est également membre du comité technique QS/1 de BSI, organisme de normalisation britannique équivalent d’Afnor.
En 2015, alors qu’il préparait sa 7ème édition de sa bible Qualité pour intégrer les évolutions 2015 du référentiel et que, de mon côté, je mettais un point final au métamodèle Performance Qualité TPE – PME (cf. numéro 88 de Qualité Références), nous avons constaté nos convergences de vues et aussi nos différences, dont une cause probable réside dans le fait qu’il ne parle pas français et que mon anglais n’est pas fameux. Ah si seulement nous avions pu discuter autour d’une bonne bouteille de Whisky (avec modération), je ne doute pas que nos points de vue aient convergé plus rapidement ! Heureusement que son épouse, bilingue français – anglais, a contribué au travail de traduction.
Cet entretien sur l’ISO 9001, le premier d’une possible série, porte et c’est bien compréhensible sur son titre même et la notion de Système de Management de la Qualité. Qu’est-ce donc que cette chose ? D’où vient-elle ? Que produit un SMQ ? Que sont les résultats attendus du SMQ, invoqués plusieurs fois dans le référentiel ? Telles sont les questions que j’ai posées et auxquelles David a répondu, avec pédagogie et humour, cela va de soi, et un brin de provocation aussi !
Vos commentaires et réactions sont les bienvenus !
Grande-Bretagne : Entretien avec David Hoyle
- OK : Bonjour David et merci de nous accorder cet entretien. Tout d’abord, pour nos lecteurs, pouvez-vous situer votre expérience en matière de démarches qualité, notamment avec le référentiel source qu’est l’ISO 9001 ?
DH : C’est un plaisir pour moi de m’exprimer dans votre revue française dédiée à la Qualité. J’ai commencé à m’intéresser professionnellement au management de la qualité dans les années 1970 en acceptant un poste d’ingénieur qualité au sein d’une entreprise spécialisée dans le développement d’engins spatiaux. J’entends encore mon patron de l’époque me dire que la qualité, en ingénierie, se déclinait en prévention, détection et correction et que le but était de réduire le temps et les ressources passées en détection et correction grâce à l’investissement en prévention. Cet enseignement est resté gravé dans mon esprit, tout au long de ma carrière professionnelle. Bien entendu, dans ce secteur d’activités, la prévention est essentielle car, en opération, le retour d’un aéronef en atelier pour réparation n’est pas chose facile. Ce qui oblige à faire appel à des méthodes de conception et de développement éprouvées et tolérantes aux dysfonctionnements.
J’ai pu participer à de nombreux projets internationaux, à toutes les phases de développement, et m’approprier différents référentiels normatifs en vigueur aux USA et en Europe. Les difficultés à tenir les exigences, provenant notamment de la multiplicité de sous-traitants dans différents pays, m’ont appris à quel point la qualité de la communication était importante pour la réussite de projets collectifs.
En 1987, lors de la première publication de l’ISO 9001, j’étais responsable qualité dans une entreprise de développement de systèmes électroniques temps-réel. Nous avions déjà des politiques et pratiques de travail qui englobaient et dépassaient les exigences du référentiel et ce n’est que plus tard, en tant que consultant qualité, en accompagnant mes clients dans la mise en correspondance des pratiques existantes avec les exigences de l’ISO 9001, que je me suis aperçu des faiblesses du référentiel. Nous étions au début des années 1990 et nous appliquions une méthode, considérée alors comme pionnière, visant à identifier et modéliser les processus métiers de nos clients en restituant leurs structures arborescentes. Une évolution dans mes activités de tutorat de formateurs m’a alors sensibilisé aux différences de compréhension des exigences du référentiel que l’on pouvait rencontrer dans différents pays.
- OK : En tant qu’acteur et praticien de la qualité de longue date, que pensez-vous de la décision, fondée sur une enquête internationale et sur le travail du sous-comité ad hoc de l’ISO, de ne pas faire évoluer le norme ISO 9001 à l’échéance 2022-23 ? Est-ce que cela signifie qu’il n’y a rien à améliorer ou à développer dans ce référentiel ?
DH : Je n’ai aucun doute sur le fait que le couple ISO 9001 et ISO 9000 nécessiterait une révision afin de supprimer les nombreuses incohérences et ambiguïtés dans les définitions et les exigences, bien que l’on puisse douter que ces incohérences portent un réel préjudice à la qualité des productions des entreprises. En effet, l’environnement dans lequel ces normes sont mises en application a sensiblement changé et les effets conjugués du changement climatique, de la pandémie, des évolutions managériales et des innovations techniques ont pu avoir pour effet de réduire les avantages qu’un organisme peut tirer de la mise en œuvre du référentiel et de ses exigences, rendues obsolètes ou redondantes au vu de ces évolutions du contexte des entreprises.
Quoiqu’il en soit, au sein du TC 176 /SC 2, l’écart entre les votes de confirmation (36) et ceux en faveur de la révision (32) était faible mais il obligeait à suivre la majorité. Il me semble, par ailleurs, que trop d’entreprises éprouvent encore des difficultés à s’approprier la version 2015 et qu’il aurait donc été malvenu d’engager une révision majeure en ce moment. Un second vote au sein du sous-comité a validé la mise en place d’un groupe de travail chargé pendant les trois prochaines années de recueillir des informations et d’étudier les besoins de révision du référentiel.
- OK : La voix de la prudence l’a emporté en quelque sorte ! Pouvez-vous nous rappeler l’historique de l’élaboration de l’ISO 9001 et les conséquences de la superposition de couches rédactionnelles ?
DH : Le concept de système qualité est né après la seconde guerre mondiale à une époque où les organisations industrielles étaient encore sous l’influence des travaux de deux célèbres ingénieurs, FW. Taylor, l’américain, et Henri Fayol, le français. Leurs apports théoriques, contribuant pour Taylor à l’amélioration de la productivité des entreprises et pour Fayol à l’amélioration de l’efficacité du management, demeurent perceptibles dans le contenu de l’ISO 9001.
L’ISO 9001:1987 pourrait être qualifiée d’approche méthodique du management de la qualité, du fait de ses 20 chapitres d’exigences requérant l’existence et l’application de procédures pour maîtriser des paramètres d’activités connus pour leur incidence sur la qualité produite.
En 2000, les normes de la famille ISO 9000 ont connu une révision importante, de structure et de nature, abandonnant les exigences formelles de procédures au profit de processus pilotés au travers du cycle PDCA. La plupart des exigences d’origine furent néanmoins maintenues dans la nouvelle version, par souci de compatibilité descendante, et cela constitua le premier défi consistant à tenter de répartir les anciennes exigences dans la nouvelle structure.
Le second défi résidait dans le changement de titre passant de Système qualité à Système de management de la qualité, induisant l’idée que dorénavant le système ne concernait que des activités pour orienter et diriger un organisme, alors que le terme système qualité faisait référence à tous les moyens ayant une incidence sur la qualité des éléments produits par un organisme.
L’approche processus n’a pas été très bien expliquée dans les documents normatifs et cela a conduit certaines entreprises à simplement renommer les procédures en processus ou d’autres à produire des centaines de diagrammes de flux. Ce qui n’a pas été bien réussi c’est le changement de vision entre faire (quelque chose) et accomplir (quelque chose) comme cela est illustré dans la Figure 1.

Aujourd’hui, dans la version 2015 du référentiel, l’accent est mis sur les résultats attendus ainsi que sur les processus pour les atteindre mais le référentiel garde encore les traces d’une approche méthodique et procédurale avec certaines ambiguïtés que je propose de développer si cela vous intéresse.
- OK : Oui David, avec plaisir ! En tout premier lieu, peut-on revenir sur la définition de Système de Management de la Qualité (SMQ) dans l’ISO 9000/9001 et ses éventuels besoins de clarification ?
DH : En Anglais, comme en Français probablement, le terme Système a, dans vie professionnelle, deux acceptions principales, l’une pour désigner une façon méthodique et systématique de faire et l’autre, pour nommer un ensemble organisé, composé d’éléments matériels ou immatériels interdépendants, en relation avec un environnement.
Ainsi, une série de méthodes pour gérer la qualité de produits d’un organisme pourrait être qualifiée de Système de management de la qualité dans la mesure où l’application de ces méthodes par les personnes concernées permettrait de définir, maîtriser et améliorer la qualité des produits de cet organisme.
De même, en identifiant tous les éléments d’un organisme en interactions pour gérer la qualité des produits, il serait également légitime de décrire cet ensemble comme étant un Système de management de la qualité, bien qu’il soit de nature différente du premier. Il serait systémique, c’est-à-dire que les changements d’états d’un élément ou plus seraient capables de modifier le comportement du système global. Cela n’est pas le cas avec un système composé uniquement de méthodes. Les méthodes préétablies n’ont pas la capacité à interagir par elles-mêmes, bien qu’elles puissent être affectées, en cours d’application, par leur environnement.
Le problème dans l’ISO 9001 n’est pas seulement que le mot Système soit utilisé dans ses deux acceptions, méthode systématique ou approche systémique mais aussi que lorsqu’il est utilisé dans ce second sens, les résultats attendus qui nous sont proposés sont différents de ceux auxquels on peut s’attendre au vu des définitions de l’ISO 9000. Le couple ISO 9001/9000 devient alors source d’ambiguïté et d’incohérence, enfreignant le principe d’unicité de sens du vocabulaire spécifique employé, raison d’être du vocabulaire spécifié dans l’ISO 9000. En voici quelques exemples.
La définition du terme Système de management dans les normes et directives ISO est “ensemble d’éléments corrélés ou en interaction d’un organisme utilisés pour établir des politiques et des objectifs et aussi des processus de façon à atteindre lesdits objectifs.” Laissant de côté la question de l’intention précise de la conjonction de coordination “ou” en début de définition, on peut en déduire que le mot Système est ici employé dans son sens systémique et non pas systématique car ce sont les éléments et leurs relations qui font exister le système et qui produisent les résultats attendus (objectifs).
Autrement dit, les produits du SMQ (ce qu’il produit), en suivant la définition de l’ISO 9000, seraient des politiques, des objectifs et des processus alors qu’en suivant l’ISO 9001 (Figure 2 en Introduction, et Chapitre 1 – Domaine d’application) les résultats attendus du SMQ semblent être des produits, des services et la satisfaction client.
Le détail des exigences de l’ISO 9001, à partir du chapitre 4, ne permet pas de lever l’ambiguïté. La capacité du SMQ à atteindre les résultats attendus est reprise dans l’ISO 9001 aux § 4.1, 5.1.1g) et 6.1.1, accréditant une vision systémique du SMQ mais laissant planer le doute sur la définition de résultats attendus du SMQ.
A contrario, notons qu’au § 4.4.1 ainsi que dans de nombreux autres paragraphes il est question d’établir et mettre en oeuvre un SMQ (implementing en anglais), une politique, des processus, des interactions … de manière méthodique et systématique.
Cette alternance ou oscillation entre les deux paradigmes Système systématique ou Système systémique, exclusifs l’un de l’autre pour une entité donnée à un temps donné, pose problème, comme illustré dans la Figure 2 ci-après.

- OK: En effet David, cela donne matière à réfléchir. Quel serait selon vous la bonne façon de s’y prendre pour résoudre le problème ?
DH : Seul le comité en charge de cette famille de normes, c’est-à-dire l’ISO/TC 176, pourrait le résoudre à condition qu’au préalable ses membres soient convaincus qu’il y a un problème, et cela ne sera pas facile ! Une fois convaincus, les membres auraient quelques options à envisager pouvant conduire à la publication d’une version amendée plutôt que d’une nouvelle révision car les clarifications attendues n’auraient pas pour but de modifier fondamentalement les pratiques qualité sur le terrain mais d’en éclairer leurs sens.
En la matière, je proposerais de :
1. Revenir à une définition du SMQ comme “ensemble de l’organisation, des plans et des moyens qu’un organisme définit et met en œuvre pour atteindre ses objectifs qualité”.
2. Modifier le texte des exigences 4.1, 5.1.1.g) et 6.1.1 pour préciser que les résultats attendus sont le produit de la mise en œuvre du SMQ et non pas le produit direct du SMQ.
3. Mettre à jour les documents et guides d’application ISO pour préciser que l’exigence établir un SMQ et ses processus signifie les déterminer et les définir et que l’exigence mettre en œuvre (implementing) le SMQ et ses processus signifie mettre en application le SMQ préalablement établi, y compris les processus spécifiés.
4. Publier une note d’explication sur les raisons de ces modifications et leurs implications pratiques.
- OK : On voit bien que la définition des mots et des concepts sont essentiels pour un partage efficace, notamment dans un environnement international et multilingue. Pouvez-vous nous donner votre lecture, en tant qu’auteur et mentor en Qualité et ISO 9001, des notions suivantes explicites ou implicites dans l’ISO 9001 : Approche système, règles métiers, management de processus ?
DH : Je dirais tout d’abord qu’il n’y a pas vraiment d’approche système dans l’ISO 9001. Quand ce référentiel fut publié pour la première fois, l’approche systémique, en tant qu’école de pensée, en était à ses débuts et ses principes n’avaient pas encore irrigué les pratiques managériales. L’introduction de cette approche systémique dans l’entreprise n’a commencé que dans les années 1990 et s’est déployée plus largement après les années 2000, aboutissant à ce qu’aujourd’hui le terme système est le plus souvent entendu par la communauté qualité dans son acception systémique plutôt que systématique.
Par ailleurs, comme vous le savez, le principe de management Approche système a été retiré de la liste des principes sous-jacents à l’ISO 9001 depuis la version 2015. De toutes façons, la manière dont le principe était défini n’était pas cohérent avec la pensée systémique. En lieu et place, la définition révisée du principe d’Approche processus semble considérer qu’un SMQ n’est rien d’autre qu’un ensemble de processus corrélés !
Pourtant, comme illustré par la Figure 3, l’approche système et l’approche processus relèvent de fondements différents. L’approche système est holistique et mobilise la compréhension des relations entre éléments pour expliquer, par la synthèse, comment les éléments influent sur le comportement du système et comment réciproquement, ils sont influencés par le système. L’approche processus, au contraire, convoque d’abord l’esprit d’analyse, avec le principe réductionniste de décomposition en tâches élémentaires assignées, pour obtenir le résultat attendu d’un travail collectif.
Les deux approches peuvent se compléter et ne sont donc pas exclusives l’une de l’autre mais correspondent à des représentations d’une situation à des niveaux différents.

Comme énoncé plus haut, l’ISO 9001 a conservé par endroits une approche méthodique et systématique illustrée par exemple dans l’exigence « l’organisme doit établir, mettre en œuvre, tenir à jour et améliorer en continu un SMQ ». Un ensemble de méthodes ou de règles peut être établi, mis en œuvre, maintenu et amélioré en continu alors qu’une approche systémique s’évertuera d’abord à comprendre comment les éléments constitutifs du système interagissent avant de chercher à les améliorer.
- OK : Dans ces conditions, comment pensez-vous que l’on puisse aller de l’avant et améliorer la situation ?
DH : Une norme conçue comme un ensemble de bonnes pratiques ne peut pas être agencée différemment, il faudrait donc la réécrire complètement. Les questions de définitions détaillées ci-dessus ont peu ou prou la même cause racine, celle de la définition imprécise et ambiguë d’un système de management de la qualité.
A partir du moment où les membres du TC 176 en seraient convaincus, on pourrait aussi leur suggérer de prendre en compte également les points suivants :
1. Recentrer les exigences du référentiel autour d’une approche méthodique et systématique car cette approche demeure utile dans de nombreuses situations et écarter les exigences faisant référence à une approche systémique,
2. Créer une nouvelle norme complémentaire, d’inspiration systémique, pour l’évaluation de l’efficacité des organisations et moyens mis en œuvre, avec des déterminants systémiques.
- OK : Tout un programme en effet ! En conclusion, David, quelle est votre avis sur le rôle et l’utilisation de l’ISO 9001 dans les prochaines années ?
DH : Le contenu de l’ISO 9001 est un recueil de bonnes pratiques applicables par des organismes pour gérer la qualité de leurs productions. Ce contenu a évolué grâce aux expertises conjointes de représentants de l’industrie, des ONG, des services d’Etat et d’autres parties prenantes. Ces personnes, par un mécanisme de recherche de consensus, délibèrent et s’accordent sur un contenu définitif. Ce fonctionnement aboutit à un cycle de production assez long, d’au moins trois ans pour une révision complète, peu adapté à l’émergence de solutions novatrices pour résoudre les nouveaux problèmes d’aujourd’hui.
Pour arracher des avantages concurrentiels, les acteurs économiques seraient probablement avisés de chercher ailleurs que dans l’ISO 9001 des conseils y compris en management de la qualité. En revanche, lorsqu’il s’agit d’adopter des pratiques et méthodes éprouvées, l’ISO 9001 peut être un bon outil pour commencer, malgré ses manques et angles morts flagrants. Notamment, il ne tient pas compte du rôle des facteurs humains et des stratégies d’acteurs qui entrent en jeu dans le management, incluant la qualité. Une des raisons probables est que ce type de facteurs ne pourraient pas être audités avec les méthodes et techniques communément utilisées dans l’audit qualité.
Nonobstant, pour conclure sur une note optimiste, gardons en tête que les bonnes pratiques ayant inspiré le contenu de l’ISO 9001 existent depuis environ 100 ans et continuent à être largement utilisées aujourd’hui. Cet outil restera probablement encore utile et facteur de compétitivité pendant des décades, notamment pour des organismes, entièrement ou partiellement, engagés dans des activités de production standardisée de produits et de services.
Bien-sûr, les changements radicaux en matière de consommation et de technologies qui s’annoncent vont probablement requérir des approches innovantes de la part des entreprises dans de nombreux domaines, y compris en qualité, qui ne permettront pas de se contenter de méthodes systématiques, même éprouvées. Dans ce contexte d’évolution par rupture, il n’est pas sûr que l’adoption des exigences de l’ISO 9001 soit une condition suffisante pour la réussite. Mais cela a-t-il jamais été le cas ?
Propos recueillis par Olec Kovalevsky
Réforme de la formation professionnelle et Qualiopi : point d’étape avec quelques acteurs du secteur de la formation (1/5)

Sabine Vansaingèle (Directrice STB Conseil–
Mes clients en formation étant essentiellement du secteur public, seule la crise sanitaire a eu un impact sur mon activité. Mes clients publics ne se sentent pas concernés pour l’instant par Qualiopi. L’intérêt pour le secteur public est cependant important car leurs commandes entrent dans le cadre des marchés publics dans lesquels l’évaluation de la qualité des prestataires est un paramètre important. A ce jour, il semblerait qu’il y ait un déficit de communication vers les administrations qui devrait être comblé, particulièrement à l’heure où le seuil des marchés publics va prochainement passer à 100 000 euros.

Florence Roudy (Directrice de Media Management)
En principe, la réforme est une source d’opportunités pour les OF mais la pleine opérationnalité du système est encore loin. Regrouper les OPCA en OPCO permet de réduire le nombre d’interlocuteurs et de simplifier les démarches. La réalité, à partir de 2019, bousculée par la crise des gilets jaunes et les grèves des transports, s’est écartée de cet idéal. Des conseillers OPCO sur le territoire n’avaient pas tous le même niveau d’information, parfois même moins que nous, et des décisions nationales n’étaient pas appliquées en région sous prétexte qu’elles étaient transitoires … Par ailleurs, les entreprises étant perdues, le simple fait de devoir demander la prise en charge d’une formation devenait un parcours du combattant et certaines ont préféré reporter ou annuler (…). Le confinement pourrait aussi être vu comme une source de développement pour les OF, à condition d’intégrer la technique de classe virtuelle ou le e-learning. Pour notre groupe, spécialisé dans le multimédia, le saut technologique était aisé. Mais à ce stade, c’est l’accès des salariés au numérique qui fait défaut en période de confinement. A ce jour, la réforme a fragilisé le système et la Covid-19 a aggravé une situation déjà compliquée, risquant d’entrainer de nombreuses défaillances alors même que l’Etat a besoin d’un organe de formation efficace pour faire face à la crise et que les entreprises ont besoin de mobiliser de nouvelles compétences pour revenir à un niveau d’activité suffisant. Ce constat est navrant …

Philippe Scelin (Directeur Général Groupe IRFA) :
Notre situation est impactée différemment en fonction des segments de marché sur lesquels nous sommes positionnés. Le secteur de l’Alternance est en pleine croissance et bénéficie du double effet de la libéralisation de l’apprentissage issue de la loi LCAP et des mesures financières du plan de relance qui incitent les entreprises à prendre des alternants Le secteur de la Formation des Demandeurs d’Emploi issue d’une commande publique plurielle a été protégé pendant la crise du Covid-19 grâce à des mesures de maintien des financements dès lors que la continuité pédagogique était avérée. Cette posture avec des nuances en fonction des régions et de pôle emploi a permis de réduire la baisse d’activité notamment due aux stagiaires résidant en zone blanche (internet) ou non équipés ou n’ayant pas des conditions ou un espace de vie adaptés ou une autonomie suffisante vis-à-vis des apprentissages. L’autre difficulté est venue des sessions qui devaient ouvrir dans la période et qui ont été reportées. Enfin, concernant le plan de développement des compétences des entreprises : arrêt total de l’activité du fait de notre positionnement sur le secteur sanitaire et social ou les salariés n’étaient pas disponibles pris par leur mobilisation professionnelle totale.

Philippe Bourdalé (Responsable Pôle Formation Professionnelle d’AFNOR CERTIFICATION) :
On constate à ce jour des organismes dont la taille critique permet de supporter ces deux coups de semonce mais majoritairement les organismes sont aux abois avec un carnet de commande réduit au néant au 1er semestre, se séparant de collaborateurs, faisant face à des investissements en formation en chute libre de la part des entreprises et à la recherche d’un second souffle sur le second semestre pour assurer la pérennité de leurs structures.
Réforme de la formation professionnelle et Qualiopi : point d’étape avec quelques acteurs du secteur de la formation (2/5)

Sabine Vansaingèle (Directrice STB Conseil)
En tant que mandataire social, sans salarié, je n’ai pas eu droit à toutes ces aides. Par ailleurs, la notion de chômage n’existant pas pour le secteur public, les agents publics n’ont pas eu de politique de renforcement de leurs possibilités de formation en période de confinement. Dans certaines administrations, la formation professionnelle a marqué un coup d’arrêt net durant le premier confinement, en raison des difficultés à passer les modules en distantiel faute de moyens technologiques adaptés pour les agents. Les budgets formation ont été parfois réduits avant la fin du premier semestre, anticipant une non utilisation durant le second semestre. Cela a contraint la marge de manoeuvre des services de formation et a donné un signe négatif sur l’importance de la formation professionnelle dans un parcours de carrière. Il semblerait que 2021 fasse l’objet également de réductions. De plus, la formation à distance se heurte à beaucoup de résistances tant humaines que technologiques, que 8 mois de crise sanitaire n’ont pas toujours résolues. Cette situation est d’autant plus surprenante que la fonction publique fait l’objet de chantiers importants de transformation, qu’une loi dite de transformation (loi 2019-828) vient outiller particulièrement sur le champ de la transition professionnelle dont les passerelles public/privé.

Florence Roudy (Directrice de Media Management)
Pour répondre présent au FNE, nous avons proposé un catalogue de classes virtuelles pour nos clients. Mais dans la pratique, le conventionnement entre la Direccte et les OPCO régionales ont pris un temps fou (télétravail oblige …). Les modules solidaires, gratuits durant le confinement, ont été appréciés et nous ont permis d’acquérir quelques nouveaux clients. Mais au final, nous n’avons fait que quelques modules en intra sur du distanciel, donc rien de très probant.
Sur les formations courtes, nous travaillons davantage sur des thématiques à enjeux pour les entreprises dans ce contexte de reprise (visibilité digitale et e-commerce notamment) via la plateforme MonCompteFormation qui monte en puissance ou via des financements classiques. En revanche, les mesures du plan de relance en faveur de l’alternance ont clairement donné envie aux entreprises de recruter massivement. De plus, ayant décidé en mai dernier de proposer nos cycles longs en alternance dès la rentrée de septembre 2020, nous étions prêts pour accueillir davantage d’élèves et optimiser nos groupes tout en respectant les contraintes sanitaires.

Philippe Scelin (Directeur Général Groupe IRFA) :
Compte tenu de la typologie de notre public, accaparé par ses missions professionnelles, le FNE formation n’a pas été mobilisé.
En revanche, les excellentes mesures en faveur de l’apprentissage nous ont permis d’accroitre notre activité en la matière.

Philippe Bourdalé (Responsable Pôle Formation Professionnelle d’AFNOR CERTIFICATION)
D’un point de vue extérieur, les mesures en faveur de l’accès à la formation pendant et après le confinement, ont été des sources d’opportunités pour une partie des acteurs du secteur de la formation. Elles ont toutefois provoqué de nombreuses frustrations par les complications administratives et financières et les relations dégradées avec les financeurs.